De tous les enseignants de l’Institut pour Jeunes Surdoués Charles Xavier, le professeur MacCoy fait figure d’extra-terrestre.
Il est en effet le seul individu de l’Ecole à se complaire dans un impeccable costume trois pièces de tweed marron, à la mode de la Belle Epoque, rehaussé par le port de lunettes en demi-lune qui vieillissent prématurément ce jeune trentenaire.
Monté sur d’énormes chaussures de cuir d’une pointure indéfini, on le croirait tout droit sorti de la machine à remonter le temps d’
H. G. Wells. Reste qu’à la première rencontre, on hésiterait sur la nature du voyageur temporel : le génial inventeur ou… un monstrueux
morlock qui se serait glissé dans ses habits.
Le professeur MacCoy affiche sa mutation au grand jour, sans complexe, exemple de courage dans ce monde où la couleur de la peau suffit à être haït.
Son corps est avant tout anormalement disproportionné : un énorme crâne massif, des épaules trop larges et de lourds membres trop longs, qui lui donnent des allures de gorille géant.
Sa bouche est déformée par des canines assez proéminentes difficile à dissimuler en parlant ou en riant.
Ses mains comme ses pieds à en juger par la pointure, sont immenses. Le bout de ses longs doigts sont armés d’impressionnantes griffes opaques.
Mais c’est avant tout sa peau qui lui interdit de passer pour un être humain normal. C’est en fait un cuir épais d’une couleur
bleu sombre recouverte d’une épaisse fourrure désordonnée, hirsute, dans la même teinte, qui lui donne une silhouette plus impressionnante encore. Sa tignasse folle , impossible à coiffer, renforce son aura de professeur Nimbus.
Physiquement à mi-chemin entre l’homme et la bête, peut-être plus prêt de cette dernière quand même, la première impression tient de la peur atavique, celle de la proie face au
Fauve.
Mais le professeur
MacCoy pour ce qu’en savent ses élèves est le plus humain des hommes. Il est possible de l’apprendre d’un coup d’œil si on ne s’arrête pas à son apparence physique mais qu’on plonge dans son ineffable regard gris bleu qui reflète sa nature attentionnée, altruiste et généreuse. Pour les plus sensible, il est possible d’y voir aussi, caché derrière son optimisme sans faille, une blessure profonde.
C’est enfin et avant tout, certainement le meilleur enseignant de sciences dont on puisse rêver. Malgré un langage soutenu, abondamment fourrés de termes encyclopédiques savoureux, parfois difficile à suivre, le professeur
MacCoy parvient pourtant comme personne à expliquer les concepts les plus abscons aux plus ignares grâce à une panoplie impressionnante de métaphores, de petites histoires et d’expériences toutes plus édifiantes que les autres, émaillé d’une passion et d’un humour bon enfant qui font passer ses cours à la vitesse d'un avion supersonique.
Rares sont les élèves qui ne tombent pas sous le charme du jeune professeur… en particulier les demoiselles qui craquent inexplicablement pour lui dès qu’il entre dans la salle de cours, laissant les garçons plus interdit que jamais sur la psychologie féminine.
Le sujet du cours d’aujourd’hui ne laisse personne indifférent : La Mutation.
Le professeur au milieu de la salle définit le terme :
- Une mutation est une variation spontanée, imprévisible et non reproductible, d’une information génétique.
Il laisse la définition infuser :
- En un mot c’est une erreur… une erreur dans le plan de montage et de fonctionnement d’un être vivant.
La classe s’agite devant le mot :
- Ne soyez pas choqué. Une erreur n’est pas forcement une mauvaise chose. C’est une erreur qui a permis à Flemming de découvrir la pénicilline qui a sauvé depuis des millions de gens à travers le monde. Ce sont nos erreurs qui nous donnent l’occasion de découvrir par nous même ce que personne ne peut nous apprendre. Une erreur c’est simplement quelque chose… de nouveau… un potentiel.
Les élèves se calme soudain plus attentif encore :
- Et c’est sur des erreurs que repose intégralement l’histoire de la Vie et son Evolution.
La sauce prend :
- Il n’y a pas un être vivant sur cette planète qui ne soit pas un mutant de son espèce, qui n’est pas une originalité dans son programme génétique qui en fait un être unique capable de bouleverser la donne dans un situation particulière. Cette situation ne se produira peut-être jamais, lui laissant croire qu’il est tellement normal… mais le potentiel existe en lui comme en chacun d’entre nous. La normalité n’est après tout que le degré zéro de la monstruosité.
Le professeur lance un regard circulaire sur la classe :
- Et nous dans tout ça ? Les études montrent que la plupart de ceux que nous appelons abusivement des mutants portent un même caractère transmissible, le gène X, qui, à l’adolescence ou à l’occasion d’un stress important, déréprime de vieilles mutations viables non sélectionnées. Avec le gène X, la nature fouille dans l’histoire de l’espèce humaine pour en exhumer d’anciennes idées non retenues par des sociétés moins tolérantes encore que les nôtres, éliminer du fait d’une alimentation trop pauvre ou d’une médecine pas assez avancée. Toutes sortes d’explications qui aujourd’hui ne sont pour une raison ou pour une autre plus de mise.
Il fait une pause puis reprend :
- Les mutants X sont actuellement classés sur une échelle comparable à celle des catastrophes naturelles c’est-à-dire selon leur pouvoir de destruction : la catégorie 0 concerne les individus qui ne montre aucune manifestation de mutation X. La catégorie 1 défini les mutants dont les pouvoirs ne présente aucun danger manifeste pour autrui. L’idée reçue est de considérer ces mutants comme faibles. Ce serait juger un pouvoir uniquement sur sa capacité à détruire. Certains mutants possèdent une capacité de guérison, de réparation… dont la valeur et l’étendue est bien supérieure à celle de catégorie 4. C’est dans la catégorie 1 que se trouve souvent l’espoir en un monde meilleur.
MacCoy regarde certains élèves avec ce qui se veut un sourire puis continue :
- Les catégories 2 présente un risque pour autrui équivalent à celui d’une arme à feu. Les catégories 3 eux tiennent plus du char d’assaut. Les catégories 4 eux valent une petite armée à eux seul. Quant aux hypothétiques catégories 5, leur potentiel sort de toutes comparaisons.
Il fait une pause puis lance :
- Bien sûr ce n’est pas la meilleure façon de classer des gens mais c’est ainsi que le gouvernement nous perçoit… en fonction du danger que nous représentons… comme une menace. Est-ce que ça vous met en colère ?